Anne-So_et_Cat Langue pendue
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| Sujet: Re: Bébé portera les deux noms Ven 4 Fév - 22:13 | |
| La loi n'est pas passé un amendement va être déposé...mais vu le gouvernement actuel rien n'est encore fait Il faut tout de même passé par l'adoption... Voici le jugement (elles ne sont pas belges je pense mais résidentes en Belgique mais ça ne change rien) en fait la loi sur l'adoption de 200§ a été déclaré anticonstitutionelle...car discriminatoire...il reste du chemin avant que notre pays fasse comme le Québec et sa "présesomption" de matérnité qui reconnait 2 parents de même sexe comme parents sur l'acte de naissance d'un enfant né au sein du couple... Voici pour info : Un arrêt très important vient d'être prononcé ce 17 Septembre 2010 par la Cour Constitutionnelle. Cet arrêt déclare la loi du 18 MAI 2006. — Loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe- inconstitutionnelle! Il s'agit plus précisément d'un arrêt concernant L’article 353-2, § 2, (voir ci-dessous) du Code civil qui viole selon cette décision les articles 10 et 11 de la Constitution. 353-2, § 2. "En cas d’adoption plénière simultanée par deux personnes de même sexe, celles-ci déclarent devant le tribunal, de commun accord, laquelle des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration. En cas d’adoption plénière par une personne de l’enfant ou de l’enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe, l’adoptant et ce dernier déclarent devant le tribunal, de commun accord, lequel des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration. Le nom choisi par les adoptants conformément aux alinéas 1er et 2 s’impose aux enfants adoptés ultérieurement par eux." Deux membres de notre association ont attaqué cet article en justice. Elles ont adopté chacune l'enfant de l'autre, né par IAD. Leur adoption a été accordée, mais pas le nom qu'elles avaient choisi pour leur deux enfants : à savoir le nom de l'une suivi du nom de l'autre. Un double nom. Cela leur avait été refusé, sur base de l'article 353-2, suite à un appel du Procureur du Roi de Bruxelles. Mais elles ont finalement eu gain de cause ! Je ne sais pas encore comment leur affaire va être réglée maintenant, ni quels chemins législatifs doivent encore être suivis (je crains qu'ils ne soient longs), mais en tout cas il s'agit d'une grande victoire, car cela laisse entrevoir éventuellement la possibilité future pour ceux et celles qui le désireront de donner les deux noms de parents à leurs enfants. Je crois qu'il y a pas mal de couples homoparentaux qui seraient intéressés par cette possibilité. L'arrêt complet ci-dessous : Citation: | A R R E T ________ En cause : les questions préjudicielles relatives à l’article 353-2, § 2, du Code civil, posées par la Cour d’appel de Bruxelles. La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Melchior et M. Bossuyt, et des juges J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey et P. Nihoul, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
2 I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par deux arrêts du 2 février 2010 en cause du procureur général contre respectivement X et Y, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 15 février 2010, la Cour d’appel de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L’article 353-2, § 2, du Code civil viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément et combinés avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en ce qu’il prévoit que ` si une personne adopte l’enfant ou l’enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe, ce dernier et l’adoptant déclarent devant le tribunal, de commun accord, lequel des deux donnera son nom à l’adopté ´, sans envisager la possibilité que l’adopté conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant, alors que cette possibilité existe en cas d’adoption par un homme de l’enfant ou de l’enfant adoptif de son épouse ou cohabitante de sexe différent, ainsi qu’en cas d’adoption simultanée par deux époux ou cohabitants, qu’ils soient de sexe différent ou de même sexe ? ». Ces affaires, inscrites sous les numéros 4869 et 4870 du rôle de la Cour, ont été jointes. Des mémoires ont été introduits par : - X.; - Y.; - le Conseil des ministres. X, Y et le Conseil des ministres ont introduit des mémoires en réponse. A l’audience publique du 14 juillet 2010 : - ont comparu : . Me C. Henricot, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me S. Sarolea, avocat au barreau de Nivelles, pour X et Y.; . Me J. Bourtembourg, qui comparaissait également loco Me N. Fortemps, avocats au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs P. Nihoul et T. Merckx-Van Goey ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.
3 Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées. II. Les faits et la procédure antérieure G.D. et N. M.N. cohabitent depuis 1998 et sont mariées depuis le 12 septembre 2005. Elles ont chacune un enfant. C.M., né en 2005, est le fils de N. M.N., et C.D., née en 2004, est la fille de G.D. Par requêtes déposées le 14 février 2008, elles ont chacune demandé au Tribunal de la jeunesse de Bruxelles d’établir l’adoption simple de l’enfant de leur conjointe, et de dire que les deux enfants porteront désormais le même nom double, composé de leurs deux noms, « D.-M.N. ». Par jugements du 22 octobre 2009, le Tribunal a fait droit à ces requêtes. Le procureur du Roi de Bruxelles a fait appel de ces deux jugements. Les appels sont limités à la question de la modification des noms des enfants adoptés, les requêtes ayant pour objet d’entendre inviter, dans chaque cas, l’intimée et son épouse à choisir de commun accord, conformément à l’article 353-2, § 2, du Code civil, laquelle des deux donnera son nom à chaque enfant. La Cour d’appel constate qu’en application de cette disposition, chacun des enfants devrait porter soit le nom de sa mère biologique, soit le nom de sa mère adoptive, mais pas un nom composé de ces deux noms. Devant la Cour, les intimées exposent qu’elles ont décidé ensemble d’avoir des enfants et de procéder à l’adoption de l’enfant de leur épouse, de sorte que les enfants sont désormais frère et soeur et forment une famille avec leurs mères, et que dans ce contexte il est important qu’ils aient le même nom de famille. La Cour d’appel constate que dans d’autres hypothèses d’adoption simple, il est possible pour l’adopté de conserver son nom d’origine et de le joindre au nom de l’adoptant. Elle en déduit que si la disposition en cause doit être interprétée comme n’autorisant pas dans l’hypothèse dont elle est saisie que l’adopté conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant, elle pourrait violer les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou combinés avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme. En conséquence, elle pose dans chaque affaire la question préjudicielle précitée. III. En droit - A – A.1.1. X et Y., intimées devant la juridiction a quo, font valoir que les règles d’attribution du nom en cas d’adoption permettent, dans plusieurs autres hypothèses que celle dans laquelle se trouvent leurs enfants, que l’on accole le nom d’origine de l’enfant et le nom de l’adoptant. C’est en effet possible en cas d’adoption, par un homme, de l’enfant ou de l’enfant adoptif de son épouse ou cohabitante, en cas d’adoption par un couple hétérosexuel ou par une personne seule, et en cas d’adoption simultanée par deux personnes de même sexe. Dans l’hypothèse de l’adoption par une personne de l’enfant de son conjoint de même sexe, il n’est par contre pas possible de donner à l’enfant un nom double composé de son nom d’origine et du nom de l’adoptant. Elles relèvent que les travaux préparatoires de la disposition en cause ne donnent aucune indication sur cette différence de traitement, et en concluent qu’il doit s’agir d’un oubli ou d’une erreur du législateur. A.1.2. X et Y. exposent qu’elles ont demandé devant la Cour d’appel que la disposition en cause soit interprétée par analogie avec les autres dispositions du Code civil régissant le nom de l’adopté et que la possibilité d’accoler les deux noms soit reconnue. Elles estiment que si l’article 353-2, § 2, du Code civil n’est pas interprété en ce sens, son application est discriminatoire au regard des articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme. Elles ajoutent qu’en tant que la disposition en cause affecte davantage les couples homosexuels que les couples hétérosexuels, elle doit
4 également être jugée discriminatoire, au vu de la volonté du législateur belge de supprimer cette distinction en matière d’adoption. A.1.3. Les intervenantes considèrent enfin que la disposition en cause, en tant qu’elle ne leur permet pas d’accoler leurs deux noms pour former le nom de leurs enfants, est contraire à l’intérêt supérieur de ceux-ci et viole en conséquence les articles 2 et 3 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant. A.2.1. Le Conseil des ministres expose que les dispositions du Code civil relatives à l’adoption ont subi deux réformes successives. Dans un premier temps, la loi du 24 avril 2003 réformant l’adoption a réalisé une refonte de la matière. Cette loi a ouvert l’adoption aux cohabitants de sexe différent. Ensuite, la loi du 18 mai 2006 modifiant certaines dispositions du Code civil a permis l’adoption d’un enfant par deux personnes de même sexe. Lors de l’adoption de ces deux lois, la volonté du législateur était de mettre la situation de l’adoption simple par un couple homosexuel sur un pied d’égalité par rapport à la situation de l’adoption simple par un couple hétérosexuel. A.2.2. Le Conseil des ministres déduit de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour constitutionnelle que si le nom d’une personne entre dans le champ d’application de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, un refus de changement de nom n’est pas forcément une ingérence dans le droit à la vie privée, et que le droit qu’a une personne de donner son nom de famille à un enfant n’est pas un droit fondamental. A.2.3. Le Conseil des ministres estime que la situation dénoncée par la question préjudicielle ne peut être comparée avec celle résultant d’une adoption simultanée par un couple formé de personnes de sexe différent (article 353-1, § 1er, du Code civil) ou par un couple de même sexe (article 353-1, § 2, du Code civil), puisque dans ces deux hypothèses, il n’y a jamais de possibilité pour l’adopté de porter les noms des deux personnes qui l’adoptent simultanément. Il relève encore que l’article 353-2, § 1er, concerne une situation où les personnes sont de sexe différent. A.2.4. Le Conseil des ministres fait valoir qu’il ressort des travaux parlementaires qu’il n’a pas été envisagé de modifier les règles générales de dévolution du nom et d’introduire la dévolution du double nom, mais qu’au contraire l’intention était de rester proche du système de dévolution du nom en vigueur pour la filiation biologique. Il précise que le choix du nom entre celui de l’auteur de l’enfant et celui de son adoptant, qui est le conjoint ou cohabitant de même sexe que l’auteur, fut imposé afin d’éviter une discrimination à l’égard des enfants dont la filiation juridique correspond à la filiation biologique, qui ne peuvent porter le double nom de leurs auteurs. Il considère enfin que le critère sur lequel repose la différence de traitement entre l’adoption par une personne de l’enfant de son conjoint ou cohabitant de même sexe et l’adoption par une personne de l’enfant adoptif de son conjoint ou cohabitant de même sexe est objectif et pertinent par rapport à l’objectif poursuivi par le législateur qui était de ne pas offrir des possibilités de choix du nom de l’adopté exorbitantes par rapport aux personnes dont le nom est attribué dans le cadre d’une filiation biologique. A.3.1. X et Y. répondent que le nom de famille est un élément participant de l’identité de l’enfant, et qu’il relève en conséquence aussi bien de son droit à la vie privée que de son droit à la vie familiale. En l’espèce, l’identité réelle des enfants ne peut être niée, et spécialement dans leur situation qui est particulière, il est de leur intérêt que leur nom la reflète. Elles précisent qu’elles ne défendent pas leur droit de transmettre leur nom, mais le droit de leurs enfants à porter un nom qui corresponde à leur identité réelle. Elles estiment que cette situation ne peut être jugée comparable à celles dans lesquelles on peut appliquer la coutume de la primauté du nom du père. Elles insistent sur le fait que les enfants concernés sont habitués à leur nom d’origine et souhaitent le conserver, mais que leur intérêt supérieur commande qu’ils portent le même nom, puisqu’ils font partie de la même famille. Elles soulignent que le législateur a lui-même prévu l’unité du nom d’une même famille, puisque le nom choisi lors de la première adoption s’impose lors des adoptions ultérieures au sein du même couple (article 353-4bis du Code civil).
5 A.3.2. Les parties intervenantes indiquent que, contrairement à ce que semble prétendre le Conseil des ministres, elles n’ont jamais soutenu qu’il était possible de donner, lors d’une adoption par des conjoints de même sexe, un nom composé des noms des deux adoptants. Elles ne soutiennent pas que leur situation est semblable à celle de l’adoption simultanée par des personnes de même sexe en ce que ces personnes pourraient toutes deux donner leur nom à l’enfant adopté, mais bien qu’il y a une similitude avec cette situation en ce que même dans ce cas, l’adopté peut conserver son nom d’origine en y accolant le nom de la personne qui l’adopte. Enfin, elles contestent l’argument du Conseil des ministres qui indique que le législateur a souhaité rester proche du système en vigueur pour la filiation biologique, dès lors que l’objectif de respecter la primauté du nom de l’homme n’a aucune pertinence s’agissant d’une adoption au sein d’un couple homosexuel. A.3.3. X et Y. soutiennent encore qu’en ce qu’elle affecte davantage les couples homosexuels que les couples hétérosexuels, la disposition doit être jugée discriminatoire, au vu de la volonté du législateur belge de supprimer cette distinction, ainsi que de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. A.4. Le Conseil des ministres répète que les situations comparées par les parties intervenantes sont différentes, et rappelle que le législateur n’a pas voulu que les enfants adoptés puissent porter le double nom de leurs deux parents afin de ne pas créer de différence de traitement avec les enfants dont l’attribution du nom est réglée par l’article 335 du Code civil. Il rappelle que dans les cas dans lesquels l’adopté peut porter un double nom, celui-ci est, en toute hypothèse, composé du nom patronymique qu’il tient d’une précédente filiation et du nom patronymique d’un de ses adoptants. - B – B.1. La question préjudicielle porte sur l’article 353-2, § 2, alinéa 1er, du Code civil, qui dispose : « Si une personne adopte l’enfant ou l’enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe, ce dernier et l’adoptant déclarent devant le tribunal, de commun accord, lequel des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration ». Cette disposition ne concerne que l’adoption simple. B.2. Le juge a quo compare la situation de l’adopté visé par cette disposition, qui ne peut porter qu’un seul nom, soit celui de son auteur soit celui de la personne qui l’adopte, avec la situation des adoptés qui, en vertu d’autres dispositions du Code civil, ont la possibilité de conserver leur nom d’origine en le faisant précéder ou suivre du nom de la personne qui procède à l’adoption simple.
6 L’article 353-1, § 1er, qui énonce les règles de base en ce qui concerne le nom de la personne qui fait l’objet d’une adoption simple, dispose : « L’adoption confère à l’adopté, en le substituant au sien, le nom de l’adoptant ou, en cas d’adoption simultanée par deux époux ou cohabitants, celui de l’homme. Les parties peuvent toutefois solliciter du tribunal que l’adopté conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant ou de l’homme adoptant. […] ». B.3. D’autres dispositions prévoient une possibilité semblable en cas d’adoption simple dans certaines situations particulières. Ainsi, l’enfant adopté simultanément par deux personnes de même sexe a la possibilité de conserver son nom d’origine, en le faisant précéder ou suivre du nom d’un des deux adoptants, déterminé par ceux-ci (article 353-1, § 2). L’enfant adopté une première fois par une femme, qui fait ensuite l’objet d’une deuxième adoption par le conjoint ou le cohabitant de sa mère adoptive, et l’enfant qui fait l’objet d’une adoption nouvelle peuvent conserver, avant ou après le nom du nouvel adoptant, selon le cas, soit leur nom d’origine, soit le nom de l’adoptant antérieur (article 353-2, § 1er). L’enfant adopté une première fois, qui fait ensuite l’objet d’une nouvelle adoption par le conjoint ou le cohabitant de même sexe de son parent adoptif, peut également conserver, à côté du nom du nouvel adoptant, selon le cas, soit son nom d’origine, soit le nom de l’adoptant antérieur (article 353-2, § 2, alinéa 2). B.4. Excepté le cas de l’adoption par une femme de l’enfant de son époux ou cohabitant, qui n’a aucune incidence sur le nom de l’adopté (article 353-4), l’enfant qui fait l’objet d’une adoption simple a toujours la possibilité de porter un nom composé du nom de l’adoptant ou d’un des adoptants et de son nom d’origine (ou du nom du premier adoptant en cas d’adoptions successives), sauf dans l’hypothèse visée par la question préjudicielle, soit lorsque l’adoption est réalisée par le conjoint ou le cohabitant de même sexe que son auteur. En d’autres termes, dans tous les cas où l’adoption simple entraîne l’attribution du nom de 7 l’adoptant à l’adopté, les parties peuvent solliciter du tribunal que l’adopté conserve son nom antérieur (ou un de ses deux noms antérieurs dans le cas d’une deuxième adoption) en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant, sauf dans l’hypothèse visée par la question préjudicielle. B.5. La disposition en cause a été introduite dans le Code civil par l’article 4 de la loi du 18 mai 2006 modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe. La justification de l’amendement dont ce texte est issu ne donne aucune explication sur l’absence, dans cette hypothèse, de possibilité pour l’adopté de faire précéder ou suivre le nom de l’adoptant de son nom d’origine. Au demeurant, les auteurs de l’amendement ne semblent pas avoir été conscients de la différence créée à ce niveau entre les enfants adoptés par le conjoint ou le compagnon de même sexe de leur auteur (hypothèse de l’article 353-2, § 2) et les enfants adoptés simultanément par deux personnes de même sexe (hypothèse de l’article 353-1, § 2), pour lesquels la loi prévoit que « les parties peuvent toutefois solliciter du tribunal que l’adopté conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom » choisi conformément au paragraphe 2, alinéa 1er, c’est-à-dire du nom de l’un ou de l’autre des adoptants. En effet, la justification de l’amendement introduisant l’article 353-2, § 2, expose que celui-ci « règle l’attribution du nom dans le cas de l’adoption de l’enfant ou l’enfant adoptif de son conjoint ou cohabitant de la même manière que prévue à l’amendement précédent » qui introduisait l’article 353-1, § 2 (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-0664/002, p. 5). Par ailleurs, la section de législation du Conseil d’Etat s’est demandée « pour quelle raison l’hypothèse visée à l’article 353-2, alinéa 2, du Code civil n’est pas également prise en compte par l’amendement » (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-0393/002, p. 89). B.6. L’article 347 du Code civil, introduit par la loi du 22 mars 1940 sur l’adoption, prévoyait que l’adoption conférait le nom de l’adoptant à l’adopté, en l’ajoutant au nom propre de ce dernier. Le nom de l’adoptant pouvait également, si les parties y consentaient, être substitué purement et simplement au nom de l’adopté. A l’origine de l’institution de l’adoption simple telle qu’elle est connue actuellement, le principe était donc que l’adopté
8 portait un nom composé de son nom d’origine et du nom de l’adoptant. Par exception à ce principe, les parties pouvaient prévoir que l’adopté ne porterait que le nom de l’adoptant. La loi du 21 mars 1969 « modifiant l’article 45 du Code civil, les titres VIII et X du livre 1er du même Code, ainsi que les lois sur l’acquisition, la perte et le recouvrement de la nationalité, coordonnées le 14 décembre 1932 » remplaça l’ensemble des articles du Code civil relatifs à l’adoption. Le nouvel article 358 du Code civil prévoyait à ce moment que l’adoption conférait à l’adopté en le substituant au sien le nom de l’adoptant ou le nom du mari adoptant. Les parties pouvaient toutefois convenir que l’adopté conserverait son nom en le faisant suivre du nom de l’adoptant ou du mari adoptant. Cette nouvelle disposition renversa donc le système en vigueur jusque-là en prévoyant en règle le remplacement du nom de l’adopté par le nom de l’adoptant. Elle maintint toutefois la possibilité pour l’adopté de conserver son nom, en le faisant suivre du nom de l’adoptant. La loi du 24 avril 2003 réformant l’adoption introduisit en outre la possibilité de faire précéder le nom de l’adopté de celui de l’adoptant, de manière à laisser « une place plus grande à l’autonomie de la volonté », les parties pouvant désormais choisir l’ordre dans lequel figurent les noms de l’adopté et de l’adoptant (Doc. parl., Chambre, 2000-2001, DOC 50-1366/001, p. 37). B.7. Contrairement à l’adoption plénière, l’adoption simple ne rompt pas tous les liens de l’adopté avec sa famille d’origine. L’adoptant est investi à l’égard de l’adopté des droits de l’autorité parentale (article 353-8 du Code civil), mais s’il vient à décéder, la mère et le père de l’enfant adoptif peuvent demander au tribunal de la jeunesse que l’enfant soit replacé sous leur autorité parentale (article 353-10). L’obligation de fournir des aliments continue d’exister entre l’adopté et ses père et mère, subsidiairement à la même obligation qui existe entre l’adopté et ses parents adoptifs (article 353-14). L’adopté et ses descendants conservent tous leurs droits héréditaires dans la famille d’origine (article 353-15), et la famille d’origine est appelée à la succession de l’adopté décédé sans postérité (article 353-16). Enfin, l’adoption simple peut, pour motifs très graves, être révoquée (article 354-1). Dans ce cas, la mère et le
9 père de l’adopté peuvent demander que l’enfant soit replacé sous leur autorité parentale (article 354-2). Le maintien de ces liens de l’adopté avec la famille d’origine justifie que le législateur ait jugé, au fil des modifications en cette matière, devoir permettre à l’adopté de conserver son nom en le faisant suivre ou précéder du nom de l’adoptant. B.8. S’il est vrai que l’enfant adopté par le conjoint ou le cohabitant de même sexe que son auteur n’est pas extrait de sa famille d’origine pour entrer dans une autre famille, sa situation n’est cependant pas différente, notamment, de celle de l’enfant adopté par le mari ou le cohabitant de sa mère ou de sa mère adoptive, ou de celle de l’enfant adopté par le conjoint ou cohabitant de même sexe que son parent adoptif. Tous ces enfants peuvent avoir le même intérêt à conserver après l’adoption le nom qu’ils portaient avant celle-ci, joint au nom de l’adoptant, puisqu’ils maintiennent le même lien avec leur famille d’origine. Il n’est dès lors pas justifié que l’enfant adopté par le conjoint ou cohabitant de même sexe que son auteur ne puisse pas conserver le nom qu’il portait avant l’adoption, en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant, alors que dans les autres hypothèses, l’enfant adopté a la possibilité de continuer à porter le nom qui était le sien avant l’adoption, précédé ou suivi du nom qui lui est attribué en conséquence de l’adoption. B.9. En ce qu’il ne prévoit pas la possibilité pour les parties de solliciter du tribunal que l’adopté conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant, l’article 353-2, § 2, du Code civil n’est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution. B.10. Dès lors que la lacune constatée en B.9 est située dans le texte soumis à la Cour, il appartient au juge a quo de mettre fin à l’inconstitutionnalité constatée par celle-ci, ce constat étant exprimé en des termes suffisamment précis et complets pour permettre que la disposition en cause soit appliquée dans le respect des articles 10 et 11 de la Constitution.
10 Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L’article 353-2, § 2, du Code civil viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il ne prévoit pas la possibilité que l’adopté, dans l’hypothèse visée par cette disposition, conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l’adoptant. Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l’audience publique du 16 septembre 2010. Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux M. Melchior |
Et la suite de l'histoire : une proposition de loi a été déposée afin de remédier à cette anticonstitutionalité. http://www.senat.be/www/?MIval=/index_senate&MENUID=21320&LANG=fr texte complet ci-dessous : Citation: | Sénat de Belgique SESSION DE 2010-2011
6 DÉCEMBRE 2010 Proposition de loi modifiant l'article 353-2, § 2, du Code civil, afin de permettre à l'enfant ou l'enfant adoptif du conjoint ou cohabitant de conserver son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l'adoptant lorsque ce dernier est l'autre conjoint ou cohabitant du même sexe (Déposée par M. François Bellot et consorts) DÉVELOPPEMENTS
Le 16 septembre 2010, la Cour constitutionnelle a rendu un arrêt (1) répondant à une question préjudicielle que lui avait adressée la cour d'appel de Bruxelles. L'objet de cette question était le suivant: l'article 353-2, § 2, du Code civil est-il discriminatoire au regard des articles 10 et 11 de la Constitution ?
Cette disposition prévoit que « si une personne adopte l'enfant ou l'enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe », ce dernier et l'adoptant doivent déclarer « devant le tribunal, de commun accord, lequel des deux donnera son nom à l'adopté », sans pour autant envisager la possibilité que l'adopté puisse conserver son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l'adoptant.
Or, cette possibilité existe en cas d'adoption par un homme de l'enfant ou de l'enfant adoptif de son épouse ou de sa cohabitante de sexe différent, ainsi qu'en cas d'adoption simultanée par deux époux ou par deux cohabitants, qu'ils soient de sexe différent ou de même sexe.
La Cour est arrivée à la conclusion que cette disposition violait bel et bien les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elle ne prévoit pas, dans l'hypothèse visée par elle, la possibilité pour l'adopté, dans l'hypothèse visée par cette disposition, de conserver son nom en le faisant précéder ou suivre du nom de l'adoptant.
Le juge a quo a comparé la situation de l'adopté visé par cette disposition — il ne peut porter qu'un seul nom, soit celui de son auteur soit celui de la personne qui l'adopte — avec la situation des adoptés qui, en vertu d'autres dispositions du Code civil, ont la possibilité de conserver leur nom d'origine en le faisant précéder ou suivre du nom de la personne qui procède à l'adoption simple.
Excepté le cas de l'adoption par une femme de l'enfant de son époux ou cohabitant, qui n'a aucune incidence sur le nom de l'adopté (article 353-4), l'enfant qui fait l'objet d'une adoption simple a toujours la possibilité de porter un nom composé du nom de l'adoptant ou d'un des adoptants et de son nom d'origine (ou du nom du premier adoptant en cas d'adoptions successives), sauf dans l'hypothèse visée par la question préjudicielle, soit lorsque l'adoption est réalisée par le conjoint ou le cohabitant de même sexe que son auteur.
La Cour a rappelé que la disposition en cause a été introduite dans le Code civil par l'article 4 de la loi du 18 mai 2006 modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l'adoption par des personnes de même sexe.
La justification de l'amendement dont ce texte est issu ne donne aucune explication sur l'absence, dans cette hypothèse, de possibilité pour l'adopté de faire précéder ou suivre le nom de l'adoptant de son nom d'origine.
En effet, la justification de l'amendement introduisant l'article 353-2, § 2, expose que celui-ci « règle l'attribution du nom dans le cas de l'adoption de l'enfant ou l'enfant adoptif de son conjoint ou cohabitant de la même manière que prévue à l'amendement précédent » qui introduisait l'article 353-1, § 2 (2) . Par ailleurs, précise la Cour constitutionnelle, la section de législation du Conseil d'État s'est demandée « pour quelle raison l'hypothèse visée à l'article 353-2, alinéa 2, du Code civil n'est pas également prise en compte par l'amendement » (3) .
Contrairement à l'adoption plénière, l'adoption simple ne rompt pas tous les liens de l'adopté avec sa famille d'origine. L'adoptant est investi à l'égard de l'adopté des droits de l'autorité parentale (article 353-8 du Code civil), mais s'il vient à décéder, la mère et le père de l'enfant adoptif peuvent demander au tribunal de la jeunesse que l'enfant soit replacé sous leur autorité parentale (article 353-10). Le maintien de ce lien avec la famille d'origine justifie que le législateur ait jugé, au fil des modifications en cette matière, devoir permettre à l'adopté de conserver son nom en le faisant suivre ou précéder du nom de l'adoptant.
Selon la Cour, s'il est vrai que l'enfant adopté par le conjoint ou le cohabitant de même sexe que son auteur n'est pas extrait de sa famille d'origine pour entrer dans une autre famille, sa situation n'est cependant pas différente, notamment, de celle de l'enfant adopté par le mari ou le cohabitant de sa mère ou de sa mère adoptive, ou de celle de l'enfant adopté par le conjoint ou cohabitant de même sexe que son parent adoptif. Tous ces enfants peuvent avoir le même intérêt à conserver, après l'adoption, le nom qu'ils portaient avant celle-ci, joint au nom de l'adoptant, puisqu'ils maintiennent le même lien avec leur famille d'origine.
La Cour en conclut dès lors, qu'il n'est « pas justifié que l'enfant adopté par le conjoint ou cohabitant de même sexe que son auteur ne puisse pas conserver le nom qu'il portait avant l'adoption, en le faisant précéder ou suivre du nom de l'adoptant, alors que dans les autres hypothèses, l'enfant adopté a la possibilité de continuer à porter le nom qui était le sien avant l'adoption, précédé ou suivi du nom qui lui est attribué en conséquence de l'adoption ».
Ce sont les raisons pour lesquelles, la Cour constitutionnelle a estimé que l'article 353-2, § 2, présentait une lacune.
Par le biais de cette proposition de loi, les auteurs entendent répondre aux griefs formulés par la Cour dans son arrêt du 16 septembre 2010. François BELLOT Alain COURTOIS Christine DEFRAIGNE. PROPOSITION DE LOI
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Dans l'article 353.2., § 2, du Code civil, inséré par la loi du 24 avril 2003 et renuméroté par la loi du 18 mai 2006, l'alinéa 1er est remplacé par ce qui suit:
« Si une personne adopte l'enfant ou l'enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe, les parties peuvent solliciter du tribunal que le nouveau nom de l'adopté soit composé de son nom d'origine ou de celui qu'il tient de cette adoption antérieure, précédé ou suivi de celui du nouvel adoptant. »
6 octobre 2010. François BELLOT Alain COURTOIS Christine DEFRAIGNE.
(1) Cour constitutionnelle, 16 septembre 2010, no 104/2010.
(2) Doc. Chambre, no 51-0664/002, 2004-2005, p. 5.
(3) Doc. Chambre, no 51-0393/002, 2004-2005, p. 89.
Au plaisir ! à
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