[Libé : 14/01/09 : Don du sang]

14 janv. 6h51
source: liberation.fr

Dons du sang : «Un risque trop élevé chez les gays»


Interview


Alors que les collectes s’élargissent, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, explique pourquoi les homosexuels en restent exclus.

36 réactions


Recueilli par ÉRIC FAVEREAU


(REUTERS)

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Vous venez de signer un arrêté encadrant les dons du sang. Est-ce à dire qu’il y aurait de nouveaux problèmes de sécurité sanitaire ?


Non. Il s’agit de l’application d’une directive européenne qui impose la rédaction d’un arrêté sur la sélection des donneurs. Cette signature intervient dans un contexte où l’Etablissement français du sang invite aux dons. J’en profite pour lancer un appel pour répondre à ce problème conjoncturel. Nous sommes aussi confrontés à un problème structurel pour maintenir notre autosuffisance. Et cela, il faut le faire en préservant la sécurité sanitaire.
Pourquoi a-t-on besoin de plus en plus de produits sanguins ?


Il y a de multiples facteurs. Les trois principaux sont, en premier lieu, le vieillissement de la population ; en deuxième lieu, de nouvelles indications thérapeutiques et, enfin, la confiance retrouvée des praticiens dans la transfusion sanguine. Nous sommes schématiquement sur une augmentation, autour de 3 % par an, des demandes de produits sanguins. Ces produits sont et resteront irremplaçables.
Vous élargissez les possibilités de dons du sang …


Oui. Pour le premier don, l’âge a ainsi été relevé à 65 ans. Les donneurs réguliers pourront le faire jusqu’à 70 - avant, c’était 65 ans. De même, le nombre maximum de dons passe de 20 à 24 par an, tous types confondus. Le but est de toujours pouvoir satisfaire les demandes.
Ce n’est pas le cas aujourd’hui ?


C’est le cas, mais cela peut être parfois tangent. Ces jours-ci, comme souvent en début d’année, il y a moins de donneurs, certains sont grippés, etc. Il faut être vigilant. On a habituellement, pour ce qui concerne le stock de globules rouges, des réserves de treize jours. Aujourd’hui, elles sont tombées à dix jours en France - huit en Ile-de-France. Il faut augmenter les prélèvements. Les donneurs donnent 1,7 fois par an. Le simple fait de le faire deux fois améliorerait la situation.
Quid de la sécurité transfusionnelle ? Y a-t-il eu, ces dernières années, des personnes touchées par des infections suite à une transfusion ?


Je n’en ai pas eu connaissance. Les enseignements ont été tirés des années 80, avec une nouvelle organisation de la transfusion, mais aussi avec des nouvelles technologies de détection de virus et une sécurisation très forte.
Cet arrêté reproduit les mêmes contre-indications qu’auparavant. Ainsi, tout homme ayant eu des rapports sexuels avec un homme ne peut pas donner son sang. Pourquoi ?


C’est vrai qu’au début, quand la question s’était de nouveau posée, j’avais clairement demandé à ce que l’on étudie la possibilité de revenir sur cette contre-indication ; tout le monde connaît mon engagement personnel. J’ai sollicité l’avis des experts et des agences sanitaires pour asseoir ma décision sur une évaluation médicale solide. En matière de risques liés au sida, tous ces experts m’ont fait part de deux éléments. D’abord, il y a une période muette de plusieurs jours, entre le moment où la personne a été en contact avec le virus et le moment où le virus circule dans le sang et donc devient détectable. Ce qui pose un vrai problème. Ensuite, les données épidémiologiques sont incontestables : entre 10 et 18 % des gays sont contaminés, alors que ce pourcentage est de 0,2 % pour les hétérosexuels. Les situations épidémiques ne sont pas les mêmes. Il y a un risque, et ce risque est trop élevé. D’où le maintien de cette contre-indication.
Vous risquez de choquer certaines associations…


Ce n’est pas une option philosophique, c’est une question de sécurité transfusionnelle. Actuellement, je ne peux pas faire courir ce risque aux malades. Mais on surveille et, s’il y a des changements, on fera évoluer la réglementation. Tous les pays européens sont sur la même ligne. Mais vous savez, de même, toute personne ayant séjourné en Grande Bretagne pendant au moins un an ne peut donner son sang en raison des risques de transmission du prion [le virus de la vache folle, ndlr]. C’est une analyse sanitaire qui nous a fait prendre cette liste des contre-indications, rien d’autre.

10 ans pour que les médecins ne tiquent plus quand je dis que je suis en couple avec une femme...
Ils réfléchissent, regardent mon dossier, puis acceptent mon don.

Et ils sont bien embarrassés quand je chipote en disant que les gays peuvent être en couple stable et qu'ils se privent de donneur ou qu'il y a des trainé(e)s partout. Là, ils disent qu'il ne faut pas avoir changé de partenaire dans les 4 derniers mois.

Lezzie.

moi c'est cette phrase qui me fait bondir :

Ensuite, les données épidémiologiques sont incontestables : entre 10 et 18 % des gays sont contaminés, alors que ce pourcentage est de 0,2 % pour les hétérosexuels

parce que 0,2% des heterosexuels déclarés contaminés, combien contaminés mais qui ne le savent pas ????????

Mutine

Remarque, ta dernière phrase peut aussi s'adresser aux gays...

Moi ça me débecte. Ils ont du sang sur les mains (c'est le cas de le dire) après le scandale du sang contaminé et font tout pour se blinder, alors qu'on a besoin de réserves. C'est scandaleux. Et ça ne donne vraiment pas envie de devenir donneur à son tour (réaction stupide, je le conçois).

Cactus

Je donne mon sang depuis des années, et justement aujourd'hui je suis allée donner mon sang.
Ce qui a changé c'est leur questionnaire. Avant on te demandait si tu avais un partenaire de même sexe, maintenant ce n'est plus le cas.
On te demande juste si tu as eu de multiples partenaires au cours des derniers mois, ce que je trouve plus sensé comme évaluation....

Mais alors justement, comment font-ils pour "sélectionner" les donneurs ? Si tu coches que tu as eu de multiples partenaires, ils te posent d'autres questions pour savoir si c'était des partenaires homo ou hétéro ?

Cactus

Bachelot...

...fidèle à elle même....!

Hétéro ou homo, il y a des test hiv qui sont faits systématiquement sur les prélèvements, quand bien même on a un donneur qui se retrouvre être seropo, on jette la poche de sang, je ne vois pas ou est le problème...

C'est d'autant plus stupide qu'il y a maintenant plus de contamination chez les hétéros que chez les homos...

ily a une semaine à mon boulot il y a eu une campagne du don du sang, 49 donneurs dont la plupart des nouveaux car les habitués donnent dans leur village.
Deux collègues m'ont fait la remarque sur pourquoi je ne donnais pas, alors que je suis jeune (si, si) et en bonne santé. Pas envie de crier que "les pédés ne peuvent donner", alors je me suis contentais de dire que je ne supportais pas les piqures, ni la vue du sang, que je tombais facilement dans les pommes. Pour mon projet abandonné, j'ai quand même fais deux prises de sang sans soucis.

Je suis d'accord avec Zen, le tri est rapide tout est automatisé.
J'entend de plus en plus souvent autour de moi chez les jeunes, qu'ils adoptent désormais le "relaps", faire l'amour sans capote augmentant les risques de contamination.
Je serai tenter de croire que les homos font plus attentions, très marquées par les années 80, et les ravages du sida dans la communauté gay.
Il y a encore du boulot pour que les mentalités changent vis à vis de nous les homos/lesbiens.

A mon avis le sujet est plus complexe que la sexualité des potentiels donneurs. Un questionnaire reste un questionnaire, ce n'est pas un detecteur de mensonges donc chacun est libre de raconter ce qu'il veut. A la question "avez vous eu de multiples partenaires" certaines personnes par honte preferaient repondre non meme si c'est le cas. Le questionnaire est bidon, seul les tests effectués ensuite sont important.Homos/ heteros pour une fois tous dans le meme bateau, chaque poche de sang est examinée. Donc donner son sang doit etre ouvert a chaque personne desirant aider son prochain.

En France, il y a pénurie de don du sang, don de sperme, don d'organe, que nos politiques ouvrent les yeux au lieu de se quereller entre eux, m...e alors!!

Pour le sang, c'est d'autant plus dommage que les conditions ne sont pas aussi contraignantes pour les donneurs que le don de sperme (nécessité d'être déjà père, accord de la compagne indispensable etc) et que potentiellement, tout le monde ou presque peut donner.

Il y a un vrai problème entre les appels aux dons, légitimes, et le fait de recaler certaines personnes dites à risques. Perso, et même si le virus est peut-être plus répandu dans la communauté gay (ce qui reste à prouver en nombre de personnes atteintes, Bachelot ne donne que le pourcentage), je pense que les gay dont plus attention parce justement ils font partie de cette population à risque. Je n'ai aucun chiffre pour prouver ce que j'avance, c'est juste une impression.

Dans tous les cas, ce sont les malades qui trinquent, et on ne peut pas d'un côté appeler au don, à la citoyenneté des gens, et de l'autre refuser de bonnes âmes dont la plupart sont certainement cleans sous prétexte qu'elles vivent différemment. Il faut être cohérent.

Il y a 25 ans, les pouvoirs publics ont fait n'importe quoi, par ignorance ou malveillance, et maintenant, on se blinde alors que les contrôles sont systématiques et qu'on pourrait recruter davantage de donneurs.

Cactus

Hé bien allez prendre rendez-vous dans votre EFS, votre établissemnt français du sang et lors de l'entretien, parlez avec le médecin. Ils sont aussi là pour ça.

L.
PS : pour savoir où est le vôtre, cliquez sur le logo sous ce post.

On devrait organiser un "happening" devant l'EFS !

Mutine

c'est vrai que c'est ridicule et un parfait non-sens de refuser une catégorie de personnes (en l'occurence les gays) parce que soi-disant il y a plus de risque. C'est de la discrimination! Mais le don du sang n'est pas ouvert non plus à ceux qui ont eu une tranfusion, peu importe si c'était il y a 20 ans et que le sang s'est renouvelé par exemple... Ni à ceux qui ont séjournés dans les iles Britanniques à certaines dates...
Il faut être en parfaite santé et quelque part, c'est bien normal, on vient quand même pour aider à soigner, soulager des malades.
C'est vrai qu'on peut dire ce qu'on veut au questionnaire et au médecin (perso, ça ne m'a jamais posé pb quand j'ai dis que j'étais avec une femme, on m'a plus fait chier avec mon tatouage!!!) mais le but du jeu n'est pas de mentir et de faire perdre du temps aux infirmières!
Il y a pénurie de sang, de plaquettes et de plasma, notamment en ile de france et une fois de plus on stigmatise les homos. Je suis d'accord pour dire que c'est dégueulasse. Mais en règle générale et pour l'ensemble des potentiels donneurs, je pense qu'il faut y aller et ne rien cacher au médecin des éventuels risques (je me suis faite refouler une fois car j'avais un début de gastro!!!). Et pourtant, l'EFS m'appelle régulièrement car je suis donneuse de plaquette avec un rhésus O-...

Toujours est-il qu'il faut donner quand on peut, c'est bien le + important pour des milliers de malades qui s'en foutent de savoir avec qui on a couché la veille, croyez-moi!

Act'Up s'en charge, non ?
Et si la Bachelot revient en arrière, c'est sans doute que les médecins lui ont fait leurs rapports.

Ces médecins font super attention en plus, parce que ce sang donné (plasma, plaquettes ou sang complet) passe directement dans l'organisme d'une personne qui meurt sans ça.
J'ai déjà été refusée plusieurs fois : parce que leurs tests me déclaraient syphilitiques (ils venaient d'abaisser leurs niveaux de tolérance ou de changer de tests) et parce que j'avais trop de globules blancs, donc une suspicion de maladie (j'étais à la limite des taux admis) alors que je ne suis pas tombée malade.
Ils font super gaffe.
Le sang contaminé, ça a été un plus que grand traumatisme pour eux aussi.
Better safe than sorry.

En attendant, rien n'empêche les lesbiennes d'aller donner pour compenser le refus opposé aux gays. N'est-ce pas mesdames ?

Lezzie "28 dons".

Communiqué de presse Act Up - 14 janvier 2009



Dans un entretien accordé à Libération ce mercredi 14 janvier 2009, la ministre de la santé se targue d’avoir signé un nouvel arrêté encadrant les dons du sang. Dans ce décret, Roselyne-Bachelot entérine l’exclusion des homosexuels du don du sang, malgré les engagements pris (et non tenus) par Xavier Bertrand lorsqu’il était ministre de la santé.

Depuis la parution d’une circulaire en 1983, les hommes homosexuels sont exclus du don du sang parce que considérés comme appartenant à un « groupe à risque ». Une réponse positive à la question « Avez-vous eu des rapports sexuels entre hommes ? » lors de l’entretien préalable suffit pour se voir définitivement exclu du don du sang. En interdisant le don du sang aux homosexuels, Roselyne Bachelot entretient la fiction discriminatoire, et dans ce cas d’espèce homophobe, selon laquelle il y aurait des groupes à risques ; or il n’y a que des pratiques à risques.

La ministre justifie cette discrimination par la forte prévalence du VIH parmi les hommes homosexuels. Pourtant, d’autres pays comme le Portugal ont récemment ouvert le don du sang aux homosexuels au nom de « l’égalité des critères pour tous » sans pour autant mettre en péril la sécurité transfusionnelle.

Le 27 novembre 2007, Roselyne Bachelot avait annoncé qu’elle allait lever l’interdiction pour les homosexuels de donner leur sang. Pour autant, la circulaire publiée par le ministère de la santé le 10 avril 2008 n’avait rien changé à l’état de fait précédent. Seule la rédaction du questionnaire avait été révisée pour en réduire l’aspect discriminatoire. Au final, ce questionnaire est non seulement discriminatoire, mais aussi dangereux car il introduit une confusion sur la nature des risques de transmission du VIH.

Les critères de sélection des donneurs ne permettent pas d’évaluer le fait d’avoir eu ou non des rapports systématiquement protégés ou le fait d’avoir effectué un test de dépistage. Données qui pourtant constituent les seules bases fiables à une évaluation efficace du risque transfusionnel, objective et non discriminante, du niveau de risque d’infection.

Aujourd’hui, près des 2/3 des contaminations en France ont lieu chez les hétérosexuels : loin d’être élaboré sur la base d’une évaluation réelle du risque, les nouvelles règles sur le don du sang restent basées sur une perception périmée de l’épidémie.

Act Up-Paris dénonce la décision prise par Roselyne Bachelot et exige l’ouverture du don du sang aux homosexuels ;
Act Up-Paris, exige du ministère de la Santé et de l’EFS (Etablissement Français du Sang) l’élaboration d’un questionnaire préalable au don du sang basé sur des données fiables et non discriminatoires de santé publique.

oui c vraiment naze comme reflexion et discriminatoire...

moi j'ai toujours donné mon sang en mentant sur ma sexualité, car j'avais pas envie d'expliquer ma vie a un medecin que je connais pas, et en plus la convaincre que m si je suis homo, je ne suis pas "forcement" atteinte d'une maladie incurable. et je continuerai

ma moitié me tarabust (jché pa komen sa sécri...) pour que j'aille donné mon sang et je ne sais pas si je dirai que je vis avec une femme!!...

Pas de problème pour les lesbiennes en bonne santé qui sont avec la même partenaire depuis plus de quatre mois, n'ont pas eu de tatouages, de plombages, n'ont pas séjourné au Royaume uni pendant gnagnagna, enfin, tout comme les hétéros.
Cette interdiction ne concerne pas les femmes homos mais les hommes.

L.